Yahia et John

Yahia[1] et John
Je m’éveillai en sursaut, je trouvais Nour ma femme assise sur notre lit, tremblant de tout son corps.
-Que se passe t-il ? Lui ai-je demandé, en me mettant sur mon séant, est-ce le même phénomène ? ai-je ajouté.
Elle se contenta de dire oui de la tête. Je regardai l’heure, il était trois heures du matin, l’aube était loin.
Me levant, j’allai lui chercher un verre d’eau. Elle était recroquevillée sur elle-même emmitouflée dans l’une de nos plus chaudes couvertures, en prenant le verre de ma main, je remarquer l’expression de ses yeux, elle était fiévreuse.
La température dehors était 1 au-dessous de zéro, c’était incroyable, jamais la côte Africaine nord n’avait connu un hiver aussi froid !
- Yahia ? Me dit tout à coup ma femme.
- Oui.
- Nous devons partir tout de suite.
Encore ensommeillé, je lui dis :
- Tu te rends compte ! Tu sais que la neige dehors est dru et que le moteur de la voiture ne vas pas démarrer tout de suite et puis où tu veux aller ?
- Nous devons traverser la ville et aller sur la jetée nord du port.
A ce moment là je compris, que Nour était tout à fait sérieuse. Elle avait rejeté la couverture et se dirigeait vers la salle de bain contigue.
Je priai Allah pour avoir l’énergie de suivre ma femme et de défier le froid dehors. En me lavant le visage quand mon tour vint je fis mes ablutions et je cherchai les clefs de la voiture.
A un moment, le sourire de ma femme attira mon attention. D’habitude quand surviennent ces crises étranges, elle était toute inquiète et elle avait besoin de toute ma tendresse pour supporter ces accès de fièvre intense, aujourd’hui elle me paraissait bizarrement calme, même joyeuse.
Je lui souriais, et je sortis. Descendant les deux étages de notre bâtiment, j’allai vers la voiture dehors recouverte de neige garé dans le parking en face de notre f3.
Je pria Allah pour que le bruit de la voiture ne fasse pas réveiller les voisins.
A un signe de ma part, Nour sortit méconnaissable dans un manteau avec un bonnet et un cache nez qui la dissimulait entièrement, en grimpant près de moi. Elle posa sa main sur la mienne, ses doigts tremblaient encore :
-Je te remercie pour ton infini patience avec moi, me dit- elle.
-Voyons ! Tu es l’épouse idéale pour moi, pourquoi ne veux-tu pas que je sois avec toi patient ? Lui ai-je répondue en souriant.
En démarrant, elle m’instruisit :
-Prends le raccourci, donc la nationale 7.
-Ok.
La route était presque déserte, sauf un motard de la police et un camion lourd l’accès était libre. Nous arrivâmes non loin de la jetée, je garai la voiture tout au long du trottoir et je l’aidai à descendre, à l’opposé de la jetée elle se dirigea. Derrière, je la suivai. On descendirent deux marches, puis le sable froid mêlé à la neige nous donna une drôle d’impression. Cherchant sa main j’avançai, on marchèrent à l’est pendant longtemps pour nous retrouver dans un endroit tout à fait désert où pas âme qui vive aux alentours. La mer houleuse au début, se calma peu à peu.
Dans l’obscurité, je n’arrivai pas à entrevoir le visage de ma femme, pas de lune, il faisait sombre très sombre, soudain j’entendis sa voix :
- Yahia regarde devant toi.
C’était la mer le bruit des vagues puis soudain je tressailli, une lueur se profilait au loin.
- Qu’est ce que c’est ? Lui ai-je demandé à voix basse en la serrant contre moi.
Elle ne me répondit pas, je voulais parler mais je sentis une force inhumaine me clouait la bouche.
Incroyable la lueur s’approchait de plus en plus, peu à peu on commençaient à distinguer une silhouette. Je regardai de tous mes yeux, cette silhouette était humaine il y’avait là à quelque cent mètre de nous un homme qui venait en marchant sur l’eau mais je ne pouvais apercevoir son visage !!!
Brusquement la silhouette s’arrêta à moins de 50 mètre de nous !
- - Yahia viens.
La voix venait de nulle part.
Ma femme me poussa gentiment en me murmurant d’une voix inaudible :
- Vas-y.
Terrorisé, j’allais vers la silhouette, plus j’approchai plus il m’étais difficile de distinguer les traits :
- - Arrête toi.
M’ordonna la voix de nulle part, tout devint calme autour de nous la mer, la neige s’était arrêté de tomber. Je voulais me retourner cherchant Nour, je ne pus :
- - Me reconnais-tu ?
Regardant dans la direction de la silhouette qui s’était rapprochait encore, je me figeai c’était le président John Fitzgerald Kennedy !
Il était si jeune avec son sourire brave, je commençai à pleurer inconsciemment
- - Que me veux-tu Yahia ?
- - Où êtes-vous monsieur le président ?
- - Je suis poussière.
- - Qui vous a assassiné ?
- - Des hommes de poussière comme moi.
- - Que s’est t-il passé le 22 novembre 1963 ?
- - Dieu a décrété que ma mission était terminé.
- - Qui sont vos assassins Monsieur le président ?
- - Des êtres de poussière qui se sont crus immortels.
- - On vous regrette Monsieur le président.
- - Ne me regrettez pas, j’ai moi aussi pêché, cette vie n’est qu’une station, Yahia pensez à l’autre vie.
- Monsieur le président Kennedy pour avoir accès à l’autre vie nous devons passer par le jugement dernier et ce jour là est terrible lui ai-je dit.
Le sourire aérien du président reparut :
- - Le jour du jugement a commencé Yahia ! Celui qui a bien agit ici bas ne craindra jamais le jour du jugement.
- - Monsieur le président… je m’interrompis, la silhouette du président s’éloignait, se tournant vers moi, il leva sa main et me fit signifier adieu.
A cet instant comme un fou, je courrai derrière lui entrant dans l’eau glacé mais une force me projeta doucement sur le sable, je m’éveillai grelottant dans les bras de ma femme Nour, elle me regardait avec sérénité :
- - Qui était cet homme ?
- - Le président Kennedy.
Dans le lointain une lueur se fit.
- - C’est l’aube. Me dit-elle.
- - Dis Nour, tu me crois, j’ai parlé au président Kennedy ? Lui ai-je dit en me relevant.
Tous deux on repartirent vers la jetée
- - Biens sûr que je te crois, quelles étaient ces dernières paroles ?
Je les lui répétai :
- Le jour du jugement a commencé Yahia ! Celui qui a bien agit ici bas ne craindra jamais le jour du jugement.
Elle se tint silencieuse :
- - N’as-tu rien à dire ? Lui ai-je demandé.
- - Si.
Puis se tournant vers moi, je ne réussis pas à déchiffrer ses traits mais sa voix fut comme un baume pour moi :
- - Il nous a annoncé la bonne nouvelle, Allah plie le sijil[2].
Fin


[1] YAHIA est la version Arabe de John
[2] Verset Coranique 104 de la sourate Les Prophètes ( Le jour où Nous plierons le ciel comme on plie le rouleau des livres »Sijil »en arabe. Tout comme Nous avons commencé la première création, ainsi Nous la répéterons ; c’est une promesse qui Nous incombe et Nous l’accomplirons !)

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

C'est le printemps !

Marine Le Pen devrait être présidentiable

Et la vie continue à Sarajevo...